mardi 8 octobre 2013
mercredi 25 septembre 2013
samedi 13 octobre 2012
Présentation
(..Physiquement
mort, DEMBA, tu resteras encore vivant parmi nous. Ton souvenir vivace restera
éternel pour les jeunes générations. Chaque regard sur le passé fera renaitre
comme tu as su le faire, au sein du BEMBEYA JAZZ NATIONAL, pour nos illustres
héros ALMAMY SAMORY et MORY FINDIAN DIABATE. DEMBA, tes lèvres et tes paupières
semblent définitivement closes, prises qu’elles sont dans les serres acérées de
cette mort inévitable, de ce destin inexorable, mais ta voix male et combien
douce berce encore nos oreilles, ton regard d’homme plein de personnalité
indique encore à tes camarades du BEMBEYA JAZZ et de toute la jeunesse
Guinéenne et Africaine, celle de la réhabilitation et de revalorisation de
l’art et de la culture Africains…)
Au très
regretté compositeur, le chanteur soliste Aboubacar Demba CAMARA, décédé le 5
avril 1973 à Dakar, des suites d’un stupide accident de circulation.
Compositeur
heureux ou adaptateur inspiré de ses « chants de cygnes » (pourrait-on
dire) DEMBA leur a insufflé sa sensibilité de poète, son génie inné de musicien
traditionnel, ses recherches et ses fantaisies d’animateur moderne, en des
accents si chauds et si pathétiques, en des cris de cœur si communicatifs,
qu’ils retentiront à jamais aux oreilles d’auditeurs admiratifs.
C’est sur
invitation du Secrétaire d’Etat que le 31 mars, l’orchestre moderne BEMBEYA
JAZZ NATIONAL s’envole pour Dakar où il atterrit à 22h10. A l’aéroport, de
nombreux cars et voitures attendent; DEMBA et deux de ses collègues SALIF KABA,
le second chanteur et SEKOU DIABATE guitare-solo, empruntent une Peugeot 504
pour gagner la ville.
La voiture
lancée à vive allure dérape quelque cent mètres plus loin, racle les piquets
qui délimitent un virage et se retrouve les quatre roues en l’air. Accident
stupide ! Deux jeunes musiciens blessés s’extirpent péniblement des
ferrailles fumantes et retrouvent sur la chaussée DEMBA sanglant et gémissant.
Il avait été projeté hors de la voiture et avait chuté par la tête.
Transporté
d’urgence à l’Hôpital Principal de Dakar, le diagnostic des médecins ne laisse
aucun doute sur la gravité de son état : fracture du crane et forte
compression de la cage thoracique causée par la violence du choc qui l’avait
éjecté. Six jours durant, le jeune chanteur lutte avec la mort. Une hémorragie cérébrale
incontenable en plus de graves traumatismes subis par un organisme sérieusement
affaibli, auront finalement raison de sa vie.
A Conakry
à partir du 1er avril la ville est en émoi. Des bulletins de santé
optimistes sont cependant journellement diffusés à la radio jusqu’au soir du 4
avril. C’est dire que l’annonce de la mort de DEMBA a surpris et glacé de
stupeur l’ensemble du peuple de Guinée. Par un communiqué officiel traduit en
six langues nationales, le Parti et le Gouvernement décrètent deux jours de
deuil national (jeudi et vendredi) les drapeaux en berne, et décident les
obsèques nationales pour le chanteur. Une importante délégation du Parti et du
Gouvernement conduite par un membre du Bureau Politique est dépêchée à Dakar
pour ramener le corps de l’artiste défunt. Jeudi à 19 heures, l’aéroport de
Conakry-Gbéssia est bondé de monde venu spontanément accueillir la dépouille
mortelle de DEMBA CAMARA. C’est là que vont effectivement débuter les obsèques
nationales qui se poursuivront au Palais de Peuple par une longue veillée à
laquelle participeront, à tour de rôle, tous les membres du Comité Central du
P.D.G. et du Gouvernement. A Conakry, tous les dancings sont fermés.
Jamais funérailles
d’artiste n’auront connu de messages, tant de transports collectifs de
sympathie et de compassion, un tel raz de marée, de processions et de marches
funèbres dans les pays africains aussi éloignés les uns les autres que le Zaïre
et la Guinée ; la Sierra-Leone, la Haute-Volta et le Sénégal, la Côte
d’Ivoire, la Gambie, le Mali et le Liberia. Dans tous ces pays, le chanteur
compositeur du BEMBEYA JAZZ avait ses fans et était considéré comme l’un des
plus grands animateurs de la musique moderne africaine.
Vendredi 6
avril à Conakry, en présence de deux délégations officielles des gouvernements
Sierra-Léonais et Sénégalais, plus de cent mille personnes toutes vêtues, ont
accompagné à sa dernière demeure, au cimetière de Camayenne, le célèbre
compositeur chanteur, Aboubacar DEMBA CAMARA. La fanfare du Camp Boiro ouvrait
la marche funèbre en exécutant l’hymne mandingue des preux guerriers :
« BOLOBA ». Une mobilisation spontanée d’hommes, de femmes et de
jeunes en pleurs a engorgé toutes les artères de la ville. Poète et musicien de
son vivant, mort, DEMBA est pleuré en martyre, en héros impérissable de tout un
peuple.
Cependant
rien ne prédisposait DEMBA à une carrière d’artiste, surtout de
compositeur-interprète, Bègue, timide et surtout fils d’ouvrier, personne ne
pouvait prédire à Aboubacar DEMBA qu’il ferait une entrée fulgurante dans
l’arène de la musique africaine encore fortement influencée par une castisation
millénaire.
Né en 1944
à Conakry, CAMARA y débute ses études primaires auprès de son père Fodé CAMARA,
modeste ouvrier de l’Office des Chemins de fer, dénommé à l’époque
CONAKRY-NIGER.
Après le
C.E.P.E son père l’inscrit à la Section Manuelle de l’Ecole Régionale de
KANKAN, il en sort avec le diplôme d’ouvrier, ébéniste, toujours fredonnant. En
1963, affecté à Beyla, il intègre la formation fédérale BEMBEYA JAZZ qui
commençait en ce moment sa vertigineuse ascension vers le titre national.
DEMBA doit
alors lutter sur plusieurs fronts pour devenir l’animateur à succès que l’on
pleure aujourd’hui. D’une famille originaire de Saraya, petite gare près de
Kouroussa, sa venue à l’orchestre en qualité de chanteur était considérée par
ses parents comme une fuite devant les taches plus « sérieuses » de
menuisier à l’établi. Ces réticences, bien sur, seront balayées avec les succès
que BEMBEYA JAZZ remportera pour accéder en 1966 comme orchestre national,
après un voyage triomphal à Cuba. C’est là dans la grande île de la liberté,
qu'il fit pleurer le vieil animateur afro-cubain Abelado Barroso en
interprétant en espagnol les grands succès de la riche carrière de septuagénaire.
DEMBA suit
très tôt et apprit vite que pour s’imposer comme interprète d’une grande
formation nationale, il faut travailler sa voix, soigner sa diction, acquérir
du souffle, discipliner ce souffle, exercer ses oreilles et aviver son sens du
rythme et de la mesure. En somme un travail de tous les jours et de longue
haleine ! Il s’y employa avec rage et ténacité, en s’inspirant des styles
d’interprétation des bardes africains.
Passionné
de chants et de musique, attentif aux différents rythmes qui caractérisent les
musiques africaines, DEMBA s’est affirmé comme un chercheur qui aime les
folk-songs sans pour autant dédaigner les autres genres. Magnétophone en
bandoulière, il était assidument aux portes de tous les artistes traditionnels
de Conakry.
Sa voix
male, ou rauque doux et prenant, le mit à l’aise dans les genres et tous les
styles d’interprétation. Plus qu’un chanteur DEMBA était devenu un
« monstre de spectacle, un maître à ambiance !»
Au sein du
célèbre BEMBEYA JAZZ NATIONAL, il fait à travers l’Afrique Occidentale
plusieurs tournées des capitales. Et partout ou il s’est produit, il a amené
ses collègues de rencontre à méditer son prodigieux style d’animation. Les
succès « REGARD SUR LE PASSE » « BALLAKE » « ARMEE
GUINEENNE » « WARABA » et tant d’autres qui sont à l’affiche
des « hit-parades » des radios-télévisions, succès qui sont imités
par beaucoup de formations africaines, portent tous le cachet original de
composition, d’adaptation et d’interprétation de DEMBA CAMARA.
En Afrique
comme partout ailleurs, les chansons volent de lèvres en lèvres, de génération
en génération, gorgées d’histoires, d’amour et de vie. Les créations de
Aboubacar DEMBA CAMARA, surtout ses « derniers succès », c’est le
chant de cygne d’un grand poète, d’un grand musicien africain, et le message
vocalisé d’un chanteur que les siècles ne feront plus taire.
IBRAHIMA KHALIL DIARE
12ème DJEMBE D'OR-------by K.I.N.G |
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